A son invention à la fin des années 1870, la carte postale ne comporte aucune illustration ; il faut attendre la fin du siècle pour voir y apparaître des images et le début du siècle suivant pour qu’y soient reproduites les premières photographies. Initialement, le verso de la carte est exclusivement réservé à l’adresse et le message envoyé à son destinataire doit être écrit au recto, en profitant de la place laissée aux marges.
Cette carte postale de l’église Saint-Joseph, issue des collections de la Bibliothèque de Genève, date donc très probablement des années 1890 : la photographie n’a pas encore remplacé le dessin et celui-ci est environné d’un grand espace vide tout prêt à recevoir un texte manuscrit. Ce qu’on perçoit des abords de l’édifice vient confirmer cette hypothèse : la grille visible à gauche du porche entourait le bâtiment primitif, inauguré en 1869 ; elle disparaîtra trente ans plus tard, lorsque des bas-côtés seront ajoutés afin d’accueillir des fidèles de plus en plus nombreux.
Les procès-verbaux des différentes instances de la paroisse, retrouvés dans les archives de la cure, permettent de retracer les étapes des transformations qui vont être entreprises sur le bâtiment. La première date de 1894. Lorsque le chanoine Jean-Marie Jacquard, curé, en fait la relation au conseil d’administration l’année suivante, le procès-verbaliste ne note que des « modifications et réparations importantes » ; longtemps, les historiens en ont été réduits, sur la base d’un article largement postérieur du bulletin paroissial, à supposer qu’il s’agissait de l’ajout d’un déambulatoire autour du cœur. Mais il leur fallait alors faire confiance à des propos tenus en 1939, soit 45 ans plus tard… Une lecture attentive des comptes-rendus des années suivantes m’a permis de confirmer cette donnée. Quand il est à nouveau question de travaux lors de la séance du 2 avril 1898, le point de l’ordre du jour relatif à cet objet commence par un rappel précis de ce qui a déjà été construit : il s’agit bel et bien d’un déambulatoire !
L’élargissement des bas-côtés se fait ensuite en deux temps durant l’année 1899 : la première extension, qui doit servir de test de faisabilité et d’esthétique, est réalisée du côté de la rue du Rhône. Le résultat étant jugé satisfaisant, un ajout similaire vient border la rue Petit-Senn quelques mois plus tard, entraînant la suppression de la grille qui courait de chaque côté de la nef. Cette carte postale est donc antérieure à ces travaux. Comme l’arrière de l’édifice n’est pas visible, il est difficile de dire si l’image a été dessinée peu avant son élargissement, alors que le déambulatoire avait déjà été érigé, ou dans les années qui ont immédiatement suivi sa construction. Mais elle n’est en tous les cas pas postérieure à 1899.
Au premier plan, entouré d’objets mêlant pouvoir religieux et pouvoir laïque, figure Joseph, le saint patron de la paroisse. L’époux de Marie tient une tige de lys, fleurs que l’on retrouve sur la droite ; c’est l’un de ses attributs traditionnels et il symbolise sa chasteté. Comme on ne sait à peu près rien de la décoration primitive de l’édifice, il est impossible de dire s’il s’agit là de la représentation d’une statue qui était placée dans l’église, de la copie d’une autre statue ou d’une œuvre de pure imagination. ■
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