Si vous avez déjà entendu parler d’Altdorf, c’est probablement en raison de la sculpture monumentale qui y trône en bonne place. Il faut dire que le chef-lieu du canton d’Uri attire nombre de curieux, venus admirer la statue érigée à la gloire de Guillaume Tell. Et ce pèlerinage ne date pas d’hier.
En 1961, Philippe Graef et son frère s’aventurent jusque sur les rives du lac des Quatre-Cantons, depuis leur Chaux-de-Fonds natale. Leurs parents désirent les emmener découvrir les lieux marquants de l’histoire suisse. Mais pourquoi donc Altdorf ? Après tout, à la fin du XIXe siècle déjà, il apparaissait clairement que le personnage de Guillaume Tell n’était rien de plus qu’une légende.
Seulement voilà, à l’aube de la Seconde Guerre mondiale, la politique de « défense spirituelle » qui prévaut dans le pays remet le célèbre arbalétrier sur le devant de la scène patriotique. On loue ses qualités, ses origines paysannes et sa volonté inébranlable de protéger dame Helvétie contre vents et marées. La légende reprend donc des couleurs ; elle ne s’essoufflera que dans les années 1960.
Ambiance « Respect, mon Général »
Philippe Graef se remémore ce curieux air du temps, qui prévalait lors de l’excursion familiale à Altdorf : « Mes parents nous narraient les hauts faits de la patrie sur un ton très moralisateur, avec des relents de ‘‘Respect, mon Général !’’. J’avais treize ans et tout cela m’ennuyait. Heureusement, je trouvais de l’intérêt ailleurs. J’ai par exemple eu la chance d’avoir un professeur extraordinaire, qui transmettait ses connaissances d’histoire romaine avec passion ».
De la Suisse centrale, ce n’est d’ailleurs pas le monument à Guillaume Tell qui lui laissera l’image la plus marquante. Il se rappelle avant tout l’architecture locale : « Dans la région, vous trouvez de belles fermes opulentes. On construisait bien souvent un bâtiment plus petit à proximité, que l’on appelle le Stöckli. Il s’agit d’une maisonnette où emménageaient les parents, une fois leur fils marié et capable de reprendre le domaine ». Une façon comme une autre de tuer le père, qu’il soit simple mortel ou héros de la nation? ■
A consulter également sur notreHistoire.ch
Un classique suisse: la photo devant le monument de Guillaume Tell