Viendra-t-il ? Des nuages noirs ont semé le doute en matinée, mais la météo s’embellit à mi-journée. Il devrait donc pouvoir atterrir. Les yeux rivés sur le ciel, 30’000 personnes trépignent d’impatience à l’aérodrome de Genève-Cointrin ce dimanche 14 septembre 1930. Des hauts-parleurs diffusent la musique d’un gramophone et les commentaires enjoués d’un animateur. Cris d’enthousiasme vers 14 h: le plus grand dirigeable du monde arrive enfin. Sa carapace argentée scintille au soleil, et l’on entend son fameux ronflement sourd. Aussi imposant qu’un paquebot, il flotte pourtant dans les airs avec grâce. La foule est fascinée.
Son nom: LZ 127 Graf Zeppelin, en référence au comte («Graf») Ferdinand von Zeppelin (1838-1917), l’inventeur des dirigeables rigides en aluminium. Ces engins sont construits à Friedrichshafen en Allemagne, près du lac de Constance. Inauguré en 1928, le Graf Zeppelin suscite un fort engouement, tant par son allure majestueuse que par ses exploits, tels que la traversée de l’Atlantique et même un tour du monde. Sa vitesse dépasse les 100 km/h. Lors de ses croisières, les populations se précipitent aux balcons ou sur les toits pour l’admirer. Les Suisses en ont déjà aperçu en vol, mais c’est la première fois que les Genevois en verront un atterrir chez eux.
L’appareil a décollé de Friedrichshafen, puis a survolé Schaffhouse, Aarau, Soleure, Berne et Fribourg. Il arrive à Genève avec une heure d’avance. Mais il faut respecter le programme technique et protocolaire: il fait donc encore un tour au-dessus du lac et des environs, pour le plus grand bonheur des habitants de la région. Soudain, à 15h. ces paroles solennelles dans les hauts-parleurs: «Attention, du calme, du silence !» Il est prêt à atterrir. Avec ses 237 mètres de long, il mesure plus de la moitié de la piste de l’aérodrome, qui ne fait que 450 mètres. Ses cinq moteurs ralentissent, puis il s’immobilise au-dessus du sol. Des trappes s’ouvrent sur ses flancs. De longues cordes en jaillissent, saisies et tirées par 200 soldats aérostiers postés au sol. Pour stabiliser l’engin, des pompiers remplissent d’eau ses immenses réservoirs. Au total, pas moins de 500 bras sont à l’oeuvre pour faire atterrir une cinquantaine de passagers et membres d’équipage.
Le contraste entre la taille du dirigeable et les constructions environnantes est saisissant. Seuls les invités officiels peuvent s’en approcher. Il y a notamment le conseiller fédéral Giuseppe Motta, le président du Conseil de la Société des Nations, le ministre allemand des affaires étrangères et l’ambassadeur d’Allemagne en Suisse. Moult discours sont prononcés. Une poignée de VIP ont la chance de visiter l’aéronef mythique et ses cabines privées, sa salle à manger ou encore sa cuisine. Des fonctionnaires chargent de gros sacs dans le zeppelin: ils contiennent des milliers de lettres et cartes portant un cachet spécial célébrant cette date mémorable. Ces courriers seront lâchés en plein vol. Ils constitueront plus tard un régal pour les philatélistes et les passionnés d’aéronautique.
Le conseiller fédéral a disparu!
Vers 16h, les manœuvres du départ commencent. On détache les cordes et on vide les réservoirs. Surprise: parmi les personnalités au sol, il manque le conseiller fédéral ! Il s’est introduit dans le zeppelin à la dernière minute, avide d’en découvrir l’intérieur même si les visites étaient officiellement closes. Il en redescend in extremis, alors que les moteurs s’enclenchent déjà. «Lâchez tout !», ordonne le capitaine du dirigeable. Le géant métallique remonte lentement vers le ciel, «comme une bulle de savon», décrit La Gazette de Lausanne. Sur sa carapace, la bise fait «un bruit semblable à un énorme vol de perdreaux», image Le Journal de Genève. Sa visite, qui marque l’esprit de chacun, laisse un souvenir encore plus frappant aux serveurs du buffet officiel. Ce sont les meilleurs garçons de café de la ville, embauchés pour l’occasion. Tout enveloppés de dignité dans leurs costumes noirs en queue de pie, ils sont littéralement douchés par l’eau jaillissant des réservoirs lors du décollage.
De l’émerveillement au doute
Le LZ 127 survolera encore régulièrement la Suisse. Malgré l’émerveillement, un malaise pointe. En 1931, La Gazette de Lausanne publie un courrier critique rédigé par un ancien officier supérieur de l’armée suisse. Il souligne que le dirigeable allemand survole assidûment le territoire helvétique, tout comme l’année précédente. «Ces excursions auxquelles nous assistons, le nez en l’air et la bouche ouverte», n’auraient-elles pas des objectifs inavouables ? Cet «engin de guerre camouflé en touriste » est étonnamment autorisé à survoler le pays en toute liberté. «Si l’on écoute ce qui se dit aux champs et dans les vignes, l’impression persistante est que ces voyages ont pour but l’espionnage par la photographie.» Le Journal de Genève interpelle le Conseil fédéral, qui rétorque ceci: «La Suisse possède les meilleures cartes topographiques du monde, que chacun peut acheter. On y trouve tous les renseignements que pourrait fournir une prise photographique opérée du haut d’un zeppelin.»
De fait, les dirigeables fascinent mais portent aussi leur part d’ombre. Lors de la Première Guerre mondiale, ils ont été utilisés parfois pour lâcher des bombes. Cette pratique était peu efficace matériellement mais avait un fort impact psychologique. On savait que le mastodonte pouvait surgir discrètement et sournoisement au-dessus d’une ville au cœur de la nuit. Après la guerre, les Alliés ont empêché l’Allemagne de construire des dirigeables pendant quasi une décennie.
Le zeppelin connaît une renaissance comme transporteur de passagers. Entre 1928 et 1937, le LZ 127 fait voyager plus de 13’000 personnes en près de 600 vols, sur plus d’un million et demi de kilomètres. Le tout sans accident. En 1936, il se fait voler la vedette par le modèle Hindenburg, encore plus gigantesque. Le régime nazi, qui s’est emparé de la société Zeppelin l’année précédente, utilise les dirigeables pour sa propagande en les affublant de croix gammées. Mais en 1937, le Hindenburg s’embrase en phase d’atterrissage aux Etats-Unis. Ce drame spectaculaire et médiatisé fait tomber en disgrâce pour longtemps ce moyen de transport. Le Graf Zeppelin est transformé en musée. Les autres seront détruits par les Allemands au début de la Deuxième Guerre mondiale afin d’en récupérer les matériaux pour leur industrie de guerre. ■
Notre rubrique Témoignage et récit reprend des articles des membres de notreHistoire.ch, à l’instar de ce texte de Daniel Rupp, ancien élève du professeur Richard Ernst, lauréat du Nobel de chimie en 1991 (Le titre et les intertitres sont de la rédaction).
J’ai connu des situations assez surprenantes, comme ces dimanches pendant lesquels certains faisaient du patin à roulettes sur une autoroute, alors que des jeunes avaient installé une tente, et d’autres jouaient aux cartes sur une table de camping. Ça, c’était en 1973. Bien sûr, aujourd’hui, en matière de surprises, tout le monde est vacciné, quand la moitié de la planète au balcon applaudit l’autre moitié au boulot ! Mais quand même, j’ai gardé le souvenir d’une histoire assez incroyable.
Cela se passait en 1978. Nous étions une cinquantaine de doctorants en chimie-physique confinés hébergés dans un hôtel à Ravoire, au-dessus de Martigny. Nous suivions un séminaire de formation continue sur des sujets proches de notre spécialité. Un des intervenants était un professeur de l’EPFZ, Richard Ernst. C’est lui qui est à l’origine de cette histoire fort étonnante.
Le charme des cartes perforées
Dans les années 1970, on vivait encore à l’ère numérique austère. Les ordinateurs étaient des monstres parqués dans des centres de calcul. Il fallait leur parler dans un langage simple. Ils avaient un alphabet primitif constitué de deux lettres, le 1 et le 0. Quand on voulait communiquer, il fallait perforer des cartes sur des machines à écrire spéciales qui traduisaient les instructions en trous et absence de trous. Chaque carte perforée constituait une ligne de code. On entassait les routines dans des sortes de boîtes à chaussures. On apportait nos cartons au centre de calcul. Des opérateurs balançaient les cartes dans un lecteur, et, quelques heures plus tard, ils disposaient les listings produits par l’imprimante de ce tas de ferraille sur des étagères. On allait récupérer le fruit de notre travail au centre de calcul. Un jour, un professeur d’informatique voulut passer la frontière avec un coffre plein de ce genre de cartons à chaussures remplis de cartes perforées. Le douanier voulut calculer la Taxe à la Valeur Ajoutée. Le professeur lui fit remarquer qu’estimer la valeur ajoutée au matériel qu’il transportait dans son coffre reviendrait à peser des trous.
L’agrume et le champ magnétique
Avec le recul, l’histoire que j’essaie de rapporter me semble encore plus incroyable, compte tenu du contexte. Le professeur Richard Ernst, ce jour-là de 1978, disposa sur le rétroprojecteur une image d’une tranche de citron. Cela aurait pu être une photographie en noir et blanc d’une rondelle de l’agrume finement découpée, posée sur une table lumineuse de photographe. Il n’en était rien. Pour obtenir cette image, Richard Ernst n’avait pas découpé le citron mais l’avait introduit entier dans un champ magnétique. Il avait excité les atomes qui constituaient le fruit avec des impulsions de radiofréquence et récolté les réponses de ces atomes. Ensuite, par calcul, il avait reproduit les intensités des signaux en blanc sur fond noir. Il avait détourné une technique, bien connue en analyse structurale moléculaire, pour en faire un appareil de photo non invasif. Attendez, ce n’est pas tout !
Pour nous expliquer son tour de passe-passe, il commença à aligner les équations sur le rétroprojecteur. Comme son discours n’était pas porté par un timbre de voix de politicien en tournée électorale, on lui attacha un « micro cravate » sans fil. Cela ne faisait que quelques minutes que Richard Ernst discutait de son citron de « haut-vol », quand une patrouille de gendarmes pénétra brutalement dans la salle de conférence. Elle embarqua notre brave intervenant. Nous savions qu’il ne pouvait pas être coupable de violence, lui qui n’était même pas capable de découper un citron. En fait, une ou deux minutes plus tard, il revint et s’expliqua. Il avait l’ordre de la maréchaussée d’éteindre son « micro cravate ». À côté de l’hôtel était plantée une antenne relais de l’aéroport de Cointrin. Les signaux du « micro cravate » était retransmis dans le cockpit d’un pilote qui cherchait à atterrir à Genève. Le citron de « haut-vol » troublait la liaison du commandant, qui entendait parler de coupe citron sans rapport avec l’autorisation d’atterrir qu’il demandait désespérément!
Quelques années plus tard, le roi de Suède invita Richard Ernst à un pique-nique où il lui demanda de parler encore une fois de son citron. À l’occasion, il lui fit cadeau d’une médaille en or, celle du Prix Nobel de chimie. C’était en 1991. ■
Il
n’y a rien d’étonnant à retrouver un carnotzet au Landeron, tant, si le mot est
vaudois, le concept a fait fortune en-dehors du canton lémanique. En outre,
dans ce recoin des Caves de l’Abbaye, située dans une maison du XIVe
siècle à l’angle nord-est de la grand place centrale, on reconnaît nombre de ses
caractéristiques essentielles: mobilier sommaire et rustique, lambris simulant
une habitation rurale et objets décoratifs évoquant le vin. S’y ajoute le
sentiment de convivialité exprimé par les protagonistes, parmi lesquels à
gauche Casimir Frochaux, marchand de vins et propriétaire des lieux, et au
centre l’un de ses employés, Jean Vuillemin.
Ce
n’est pas très loin du Landeron que l’on trouve la trace du premier carnotzet. Il
voit en effet le jour à l’autre bout du lac de Neuchâtel, à Yverdon, lors de
l’Exposition cantonale vaudoise de 1894. Il n’a donc rien d’aussi traditionnel
qu’on pourrait le penser. A l’occasion de cette foire agricole et industrielle,
le tenancier de la cantine a l’idée d’aménager au sous-sol, à proximité des
cuisines, un petit local, lambrissé en planches de sapin. Il le meuble d’une
table centrale, de quelques tabourets épars et d’un vieux canapé. L’endroit
possède déjà tous les attraits qui vont assurer son succès et son caractère
novateur ne fait aucun doute. Le conteur
vaudois en fait une recension enthousiaste, s’étonnant que personne n’en ai
jamais eu l’idée auparavant.
Le
terme carnotzet est exhumé pour l’occasion. Selon Louis Monnet, le
chroniqueur du Conteur vaudois, il
désigne en patois vaudois un petit compartiment. Absent des dictionnaires
patoisants avant 1894, il apparaît après cette date dans tous les glossaires
spécialisés. Il a même les honneurs des dictionnaires Robert et Larousse de la
langue française, qui en spécifient l’origine vaudoise.
Dès son origine, le carnotzet se revêt d’autres caractéristiques qui perdurent jusqu’à aujourd’hui. Au-delà de la simple décoration, il se doit d’être enterré pour que le confinement et l’isolement y encouragent l’intimité. Il se doit aussi d’être secret et accessible qu’aux seuls initiés. En 1894, Monnet compare déjà son entrée dans le carnotzet à celle d’un néophyte dans une loge maçonnique. Enfin, le plus souvent, les femmes en sont exclues, apparentant l’ambiance virile qui y règne à celle d’un corps de garde ou d’un vestiaire sportif.
Une véritable révélation pour les Vaudois
Malgré l’exclusivité qui était censée la préserver, l’invention d’Yverdon fait l’objet de nombreux comptes rendus dans la presse et se diffuse de manière foudroyante. Pour les Vaudois, il s’agit d’une véritable révélation, comme s’ils n’avaient fait qu’attendre cette apparition, à laquelle ils aspiraient inconsciemment. Deux ans plus tard, en 1896, le carnotzet est déjà présent l’Exposition nationale suisse de Genève. Au cœur du Village suisse, autre invention éclatante du XIXe siècle finissant, il se loge dans la réplique de l’auberge vaudoise de Valeyres-sous-Rances. Dans le même temps, il conquiert le domaine privé. Le 22 juin 1908, la Gazette de Lausanne dresse le portrait nécrologique de M. Jules Capré au travers de son carnotzet devenu déjà « légendaire ». Il n’a pas les honneurs de l’Exposition nationale suisse de 1914, mais l’entre-deux-guerres lui donne son plein essor. Il fait son chemin à travers les foires commerciales et agricoles. Son exportation va bon train à l’Exposition nationale d’agriculture à Berne en 1925. L’année suivante, il est mentionné au Comptoir suisse à Lausanne.
Au cours des années 1930, il colonise les
institutions publiques. L’Hôtel de Ville de Lausanne et le Conseil d’Etat en
possèdent un. Les cafés et les restaurants se doivent de l’afficher dans leur
publicité. Le restaurant « Les Palmiers » fait paraître dans La
Gazette de Lausanne du 16 juin 1933 l’une des premières annonces vantant sa
présence, produisant un curieux mélange des genres entre exotisme végétal et
particularisme local. L’invention vaudoise crée des envieux. Les autorités
fribourgeoises déplorent dans le même journal le 1er juillet 1938
d’en être dépourvues pour accueillir leurs hôtes de marque.
L’envol du carnotzet trouve son point culminant dans l’Exposition nationale de 1939 à Zurich. L’architecte Jean-Pierre Vouga est chargé de la réalisation des quatre « pintes » romandes : fribourgeoise, neuchâteloise, valaisanne et vaudoise. Etonnamment, le carnotzet, devenu incontournable, n’est pas placé dans l’établissement vaudois, mais dans le pavillon du Valais, canton avec lequel, pourtant, il n’a aucun lien. Cette confusion est devenue courante aujourd’hui, comme celle assimilant le carnotzet à un caveau vigneron. Il s’agit peut-être alors pour le Valais d’affirmer son identité touristique, en plein développement, en se présentant notamment comme pays de vin. Le canton ajoute le carnotzet à son catalogue comme d’autres signes de reconnaissance sujet à controverses, tels le chalet ou la fondue. Autres entorses à la règle, le carnotzet est situé de plain-pied, il est percé de fenêtres donnant sur l’extérieur et s’ouvre sans restriction au public.
Un carnotzet de Mario Botta à la Banque cantonale de Fribourg
Dans l’après-guerre, le carnotzet continue à se diffuser en entrant de plein droit dans le programme de toute nouvelle construction. Les réalisations les plus contemporaines se trouvent dotées d’un équipement qui peut sembler quelque peu incongru en raison de sa forte valeur traditionnelle. Il se voit adapté au style de l’ensemble, mêlant béton apparent, briques industrielles et meubles standardisés. Le carnotzet moderne apparaît. A une époque où la prophylaxie est encore limitée, l’hôpital cantonal vaudois a le sien. Le comble est atteint avec le projet de Mario Botta pour la Banque cantonale de Fribourg en 1983. Le carnotzet est placé en attique, au huitième étage du bâtiment, juste à l’arrière de la salle du conseil d’administration. Passé de la cave au grenier, le carnotzet semble bien éloigné de sa définition d’origine.
Aujourd’hui, il est à craindre que bien des carnotzets soient en péril. En effet, on peut supposer que la génération actuelle ne partage pas la même nostalgie rurale et le goût du kitsch de leurs aïeux. De nombreux abris atomiques ont dû retourner à leur fonction d’origine ou être reconvertis en simples débarras. Le caractère secret et privé du carnotzet rend malheureusement difficile l’appréhension de ce phénomène d’abandon. ■
Pour en savoir plus
Les bâtisseurs de Lavaux, sous la direction de Bruno Corthésy, Lausanne, Presses Polytechniques et Universitaires Romande, 2019.
A consulter également sur notreHistoire.ch
La RTS en a fait une émission d’humour de 13 minutes, Cartnotzet, diffusée le samedi, de décembre 1988 à mai 1992. Voir une vidéo des Archives de la RTS
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Ce fut une très agréable surprise de recevoir ce mail de Thaïlande: un lecteur de L’Inédit, André Chaubert, établi depuis 1968 en Asie, a partagé les souvenirs de son enfance à Corsier-sur-Vevey. Son texte, délicieusement vivant et sensible, évoque les figures et les lieux de cette commune viticole de Lavaux. Il fait écho à la série que nous avons lancée en réunissant des témoignages et des récits de membres de notreHistoire.ch sur le thème des rues de notre enfance. Si vous aussi vous souhaitez contribuer, vous pouvez nous écrire – claude.zurcher@fonsart.ch – ou publier votre texte dans notreHistoire.ch. Nous l’éditerons ensuite dans L’Inédit. Nous espérons ainsi, au fil de vos contributions, constituer un recueil des lieux de notre enfance, dont les souvenirs nous accompagnent au long d’une vie (et parfois jusqu’au bout du monde). Le titre et les intertitres du texte d’André Chaubert sont de la rédaction.
Je suis né à Corsier-sur-Vevey, dans un vieil immeuble accoté au Café de la Place, maintenant devenu son petit hôtel. Je l’ai quitté il y a plus de 50 ans et maintenant, bien qu’à plusieurs milliers de kilomètres, je n’ai qu’à fermer les yeux pour m’y retrouver. La passerelle qui longe sa façade est alors de bois, et l’on n’ose y mettre le pied de peur qu’elle ne s’effondre. Le Café, géré par la « Mère Apoth » a en son centre un gros calorifère et, en hiver, avant nos leçons de catéchisme, cette bonne dame nous prépare une tasse de thé chaud, saupoudré de cannelle. Le pasteur Diserens, qui vient juste de remplacer Nusslé, nous prépare à notre confirmation dans la petite Salle de paroisse, devant la cure. Un tilleul majestueux la sépare de l’église ; peut-être d’avoir trop vu de baptêmes, de mariages et de funérailles, il a malheureusement succombé. Comme nous, il a pu apprécier d’entendre résonner l’orgue lorsque notre grand Carlo Hemmerling laissait courir ses doigts sur le clavier.
Des bandes de caoutchouc sous les semelles
Pour nous, la Route de Châtel, est la « Grande Route » et la Route de Corseaux qui nous y mène passe par-dessus le canal de la Bergère, qui est alors à ciel ouvert. Depuis son étang, en dessus de la Cure d’Attalens, la Bergère descend la Condémine, passe le chemin des Vergers, longe la propriété des Mzelles Grandchamp, suit le Chemin de Meruz sous l’Eglise libre, (on ferait bien un clin d’œil aux filles du pasteur Ladore, vision de conte de fées, avec leur belle chevelure blonde), avant de s’engouffrer dans un long tunnel. C’est un fier challenge, pour nous gamins, de la suivre sur tout son cours, et, en avançant à croupetons dans son tunnel obscur, d’arriver jusqu’à son embouchure. Gelée en hiver, torrentielle au printemps et presqu’à sec en été, la Bergère est un défi en toutes saisons.
Le long de la Route de Corseaux, les Schmidt tiennent une petite épicerie/laiterie ; leurs gamins, Kurt et Ernest, ont bien gardé leur accent d’Outre-Sarine. A l’angle du Chemin de Meruz se dresse le grand mur de la vieille maison où habitent les Rietschi ; le fils est l’un des batteurs réguliers de tambours, avec les fils Pasche, Louis et Roger, ainsi que Coderey, qui mènent le cortège des gymnastes de la Propat, à leur retour des fêtes régionales. En face, l’atelier du cordonnier Jomini. Assis devant son enclume à trois branches, il cloue bénévolement des bandes de caoutchouc sous les semelles de nos socques. Il assouplit les cuirs en les massant avec la graisse d’un bourillon de bœuf pendu à la paroi. Tout son bric-à-brac sent bon le cuir. Plus loin, sous l’escalier qui monte chez les Meylan, une porte voûtée s’ouvre sur des escaliers de pierre qui descendent au pressoir. Le sol est recouvert de pavés ronds. C’est un pressoir parmi la bonne dizaine d’autres qu’on peut compter dans notre petit village viticole. Aux vendanges, ça bourdonne d’activités. On attache une grosse corde à la grande palanche et deux costauds tournent la manivelle d’une roue à dents pour tirer la palanche et faire descendre la vis. On répète la manœuvre jusqu’à ce que la dernière goutte sorte du pressoir et remplisse la cuve à moût. Si on a bien bossé dans les vignes pendant la journée, on a droit à un verre de moût pris au goulot.
Un petit sentier part de derrière l’église pour descendre parmi les vignes jusqu’aux imprimeries Klausfelder. Le grand mur de la cour de l’église qui le surplombe lui donne des allures de coupe-gorge. Les vignes sont cultivées par deux frangins bricoleurs, peut-être les premiers inventeurs du tracasset. Le dos à la cure, quelques maisons font face à ce qui est aujourd’hui l’Esplanade. Une cour en pavés ronds amène aussi à un pressoir. Dans la cour de l’église, sous le platane, mon grand-père et son ami Fivaz construisent les grandes échelles qui servent à cueillir les cerises. Parmi les vilebrequins, les maillets et les varlopes, ça sent bon les copeaux.
La fille du syndic, la belle Irène, a fier allure à la laiterie
On appelle la Place du Temple simplement « la Place », et
sous le platane qui, de loin, fait face au café, la « Mère Gilgen »,
avec son petit chien, a pris possession du banc public. Elle fait partie du
paysage, bien que beaucoup préfèrent simplement ne pas la voir. Le domaine du
château Couvreu, bien caché derrière un haut mur, descend jusque là. Et la rue
qui le longe porte bien son nom : la Rue du Château. Ses nombreuses
dépendances comprennent aussi un pressoir et sa porte voûtée donne directement
sur la Place. Mon oncle Morel s’occupe des vignes du domaine et Duruz, avec sa
sœur, vieille fille emblématique, cultive les jardins. Dans la serre, il
prépare les plantons de légumes pour tous les gens du village, car beaucoup de
familles ont leur petit potager. La poste et la laiterie se partagent la façade
qui donne sur la Place, entre la Rue centrale et la Rue du Château. Genton est
le maître postier ; il se fait un devoir de maintenir la réputation du
fonctionnaire bourru et grincheux. La laiterie est tenue par Léon Conne, élu maintes
fois syndic. Sa fille, la belle Irène, n’est pour rien dans le succès de ses
élections, mais a fière allure dans le magasin. Les élus à la municipalité sont
en général les commerçants et les entrepreneurs du village : avec Léon
Conne, Louis Volet, charpente, qui a monté une entreprise qui sera florissante
pour ses héritiers, les frères Barbey, maçonnerie, dont Jean-Louis, un chauvin
de la montagne qui marche toujours d’un pas bien décidé dans ses souliers à
bascule. Pour confirmer sa passion, il a appelé sa villa « La
Moraine ». Son frère Alexis passe plus de temps à l’église qu’au bistrot
et est plus actif du côté de Corseaux. Il y a aussi d’autres notables comme les
Pasche, Maillard, Taverney. Aux Monts, on élit les gros propriétaires paysans :
les Buffat, les Pilet. On retrouve tous ces personnages comme experts lors de
nos examens scolaires.
La Rue du Château est très étroite et l’autobus passe avec difficulté l’angle de la maison où la fille Gottraux donne ses leçons de piano. Quand les beaux hivers nous permettent de nous luger du haut des Terreaux jusqu’en bas de la rue, nous organisons un système d’alerte pour annoncer l’arrivée de l’autobus, car il n’est pas possible, même pour une luge, de le croiser. Ça fait monter l’adrénaline et on joue au plus audacieux. Il y a deux menuiseries sur la rue : celle à Held et, plus modeste, celle à Horisberger ; sa fille Françoise sera plus tard la « Mariée » de la Fête des Vignerons de 77. Le célèbre « La Chute » habite aussi ce quartier. Il laisse beaucoup de responsabilités à ses chevaux quand il va livrer les gros blocs de glace ou les tonneaux de bière. Il ne touche pas à sa bière mais avale avec vengeance trois décis sur trois décis ; et quand notre agent de police Rochat, vêtu de son ample cape gris-vert fait la fermeture des bistrots, on entend La Chute, loin à la ronde, descendre la rue en injuriant tout le reste du monde.
Le tenancier du café a la moustache méchante
La Place du Châtelard est en somme à l’arrière du château. C’est là que son fermier attitré, Alexis Guex, maintient une imposante courtine. On ose y préférer son odeur à celle des affreux pissoirs avec leurs tôles ondulées bouffées par la rouille, juste de l’autre côté de la place, près de la fontaine. En face, c’est chez Le Poing, la boulangerie Reymond. Jamais surnom n’a aussi bien décrit son sujet, avec son nez enfoui dans sa mâchoire. C’est son fils, Noldi, qui part sur son vélo avec sa hotte, tôt le matin pour délivrer le pain, même jusqu’à Corseaux. Il s’est fait en plus une belle renommée avec ses excellents mille-feuilles et, pour nous aux examens, ses succulentes salées au sucre. Il est aussi généreux avec ses délicieuses brisures.
Un peu en dessous, l’autre pinte locale, le Café du Châtelard, dit le Chate, semble s’accrocher désespérément au sommet de la dérupe qui descend sur Vevey, vers le hangar à coton de Kohler et le collège de la Veveyse. Cette dérupe est aussi un challenge classique pour tous les gamins : il faut l’avoir grimpée à vélo ! Le tenancier du Chate, Liand, a l’œil sombre et la moustache méchante. L’affaire est bientôt reprise par la plus volubile « Mère Davet ». Encore plus en dessous, la boucherie à Rossier est posée à 45 degrés sur la pente. Il est le fier propriétaire d’une des premières voitures du village et elle lui rend bien service quand il va faire boucherie dans les fermes des environs. Il « dépiéce » parfois aussi ses cochons à côté du bistrot, devant le four à pain du Poing. Juste à côté des pissoirs, il y a la « grande barre » où on attache les attelages. Les gamins s’y amusent à faire des prouesses de futurs gymnastes de la Propat. Souvent aussi, les chevaux y restent à ruminer patiemment dans leur muselière, au bon vouloir des gaillards qui restent crochés au bistrot devant leurs trois décis. Au Chate comme à La Place, les doyens ont une table réservée près du comptoir. On y tape le carton. Le bistrot, de pair avec l’église, est le noyau du village. Tous s’y retrouvent après le culte pour l’apéro, et pour faire la cagnotte : déposer les économies de la semaine. Le dévoué Willy Marti, banquier de métier, et marié à une fille Pilet des Monts, tient les comptes en ordre.
Le Poing est toujours habillé de sa blouse blanche et de son pantalon de boulanger pointillé de noir et de blanc. De même Rossier, le boucher, qui, sur sa blouse, prend le coin de son tablier blanc dans sa ceinture pour former un parfait triangle. Et aussi Kalmann, le tonnelier, avec son tablier de cuir et son marteau accroché à la ceinture. Parmi ces doyens, on trouve aussi Lehnherr, le propriétaire de la Condémine. Lui n’appartient à aucun corps de métier ; en politique, c’est un « noir », et il ne va jamais au bistrot. Bien sûr, il a une petite chaîne en or sur le ventre pour son oignon. C’est chez Lehnherr et chez le Poing qu’ont été installés les premiers téléphones. Sur la place parfois un aiguiseur met sa bécane sur son trépied et active sa meule : on lui apporte couteaux et ciseaux. Le sympathique Gonseth passe aussi souvent là pour réparer les sommiers et les matelas. Des colporteurs plus distingués font du porte à porte : Benetti, avec ses grosses lunettes de myope, venu de Romont pour vendre ses tissus, Evard qui propose des contrats de longue durée pour les trousseaux des jeunes filles à marier et bien sûr celui de « Just », avec ses produits pour décrasser les éviers et ses cosmétiques pour adoucir les mains et dérider les ménagères.
La Rue du Collège, jusqu’au préau, est bordée de petits jardins. Les parcelles sont louées et parfois aussi comprises dans la location des appartements. Les familles s’y activent en fin de journée pour échanger les ragots et, bien sûr, pour cultiver salades, tomates, pommes de terre, carottes et autres ; ça compte d’avoir ses propres légumes. On écrème aussi notre lait, on bat notre beurre ; sans oublier les bricelets faits maison.
Le Président de la Confédération est passé par là
Au coin du préau, un magnifique magnolia glorifie la maison rose bonbon des Pasche. Willy Gras, le clarinettiste habite à l’étage. Il joue à la Lyre de Vevey et fait partie de l’ensemble du Folly, qu’on entend souvent à la radio. Le collège est imposant. C’est là qu’habite Rochat, notre aimable agent de police. A la fin des récrés, avant de monter dans les classes, on doit venir s’aligner devant les escaliers du grand perron. Mzelle Hoffmann, en enfantine, petite boule d’énergie aux doigts de fée, Mzelle Maurer, avec un petit quelque chose de Rita Hayworth, puis Mme Rochat et Mzelle Forestier, qui, avant de devenir Mme Leblond, nous laissait être témoins de la cour assidue que lui faisait son prétendant, osant l’embrasser devant toute la classe. Enfin chez les grands, Berger, avec son béret bien planté sur la tête, droit sur son vélo, ses fesses effleurant à peine la selle et qui, si on le fâche, devient tout rouge et nous soulève par le lobe de l’oreille. Il dirige aussi le Chœur paroissial et sa façon de tirer une sonnette invisible à la fin des chants lui vaut son surnom : le Tram. Baudat a les cheveux lustrés de brillantine, comme Tino Rossi sur ses albums de disque. Le mercredi, c’est l’école des garçons ; quand les filles vont à l’école ménagère apprendre la couture et la cuisine, il nous enseigne la géométrie, l’algèbre et l’instruction civique. Le samedi matin, il nous lit des extraits de Croc-Blanc de Jack London. Il a aussi la fonction de greffier. Deux régents totalement différents, mais qui, à leur manière, façonnent nos racines. Chacun de nous a des souvenirs personnels de cette période d’adolescence. Derrière le collège, une nouvelle et magnifique salle de gym, la Grande Salle, est la fierté du village. On y a même reçu en grande pompe le Président de la Confédération, Paul Chaudet. Elle est au sommet de l’art avec ses grandes fenêtres, son parterre en linoléum, ses espaliers, ses colonnes métalliques coulissantes et ajustables pour les barres fixes, ses anneaux qu’on accroche au plafond; on peut même fixer le cheval d’arçon fermement au sol. Et sa grande scène avec son rideau de théâtre rouge. La Propat, le Chœur Mixte, la Fanfare, y organisent leur soirée annuelle. Un public chaleureux vient admirer les vedettes locales : pour la gym, Willy Marti qui fait la croix de fer aux anneaux et Gilbert Aubert le grand tour à la barre fixe. Pour la « pièce », les acteurs mythiques des Monts : Louis Jordan, Ida Mouron, Fernand et Huguette Cuénod. Ma mère y a chanté, en solo et avec Gentilini, le peintre-ténor du village. Les bals qui s’en suivent mettent nos cœurs d’adolescents à l’épreuve. En été, dans le préau, ces mêmes sociétés organisent les kermesses ; les jeunes fils Pasche et Volet ont inventé un pont de danse en bois qui se monte et se démonte à volonté. Il n’y a plus qu’à inviter Pintozze et son accordéon, faire tourner la roue à pain de sucre, mettre Gugu à la cantine et l’ambiance est à. Tout le monde y met du sien. Mizou encourage les habitants à décorer le village pour recevoir les participants aux fêtes régionales de gym ou de musique. Les enfants se costument pour les cortèges. Le village s’est fait une bonne réputation et les manifestations communales, régionales et cantonales abondent. L’arrivée de Charlie Chaplin ajoute encore une touche de célébrité.
Ici habitait Rémigia, qui a brisé tant de cœur!
Au bas de la Rue Centrale, la modeste Maison de Commune ne peut en aucun point être comparée à l’Administration communale établie aujourd’hui dans les majestueuses anciennes dépendances du Château ! Elle côtoie le pressoir de l’Assoc’, le plus important du village. Il est profond et on descend dans le sous-sol par un imposant escalier de pierre. A l’étage, la « Mère Marguet » vit avec son prince charmant, Banane, infatigable cycliste, toujours avec ses boyaux de vélo croisés sur le dos. Un peu plus haut, le charcutier von Burg a ouvert son nouveau magasin avec une belle vitrine, à côté de chez ma grand-mère. Presqu’en face, le seul horloger du village, Tièche, a son atelier dans son appartement. Toutes ces maisons ont, à l’arrière, un petit jardin avec un clapier ou un poulailler. Plus loin, la petite et toujours souriante Mme Held tient une épicerie qui sera bientôt reprise par Mme Moesching. Derrière la grande fontaine, la serrurerie Mottaz ; son travail ne s’arrête pas aux serrures : portails en fer forgé, magnifiques enseignes, lustres finement travaillés. Jean-Pierre s’est fait une belle réputation dans toute la région. Au coin du sentier de Beau Site habite le notable Alfred Taverney, avec son grand nez violacé et sa moustache gauloise. Sa femme pose sa poitrine opulente sur la fenêtre et sait tout ce qui se passe dans le village. Le sentier, très étroit, mène chez les Villars, Francis (notre Oin-Oin) et ses sœurs qui deviennent de plus en plus jolies en grandissant. De l’autre côté de la rue, la maison cossue des de Palézieux, avec, sur le montant de la porte, une sonnette dorée, toujours bien polie, qui ne demande qu’à être tirée. Ça nous coûte bien quelques punitions !
Derrière leur mur, comme chez les Couvreu, ils vivent dans un monde à part. Pour les coupes de cheveux, chez Germain, le barbier du village ; pêcheur de rivière dans son temps libre, il nous conte ses exploits en égalisant soigneusement nos favoris. Dans le miroir, on peut voir le père Chambaz, sérieux, noir sur son vélo noir, la bible sur son porte-bagage, partir à son boulot chez Obrist, sous la carrière, au bas de Meruz. On voit aussi passer notre facteur Groux qui pousse sa charrette ; une sacoche ne suffit pas pour tout le courrier du village, c’est pas encore midi et déjà sa casquette est sur Soleure. Chez le vigneron Reymond, une magnifique glycine embellit la façade, au-dessus de la porte du pressoir. C’est là aussi qu’habite Rémigia qui a brisé tant de cœurs en repartant en Italie. Ensuite, l’épicerie de Mzelle Nicklaus, une caverne d’Ali Baba : rouleaux de réglisse, sucre candi, caramels de toutes les couleurs dans de gros bocaux. Il y fait sombre, mais il y a des trésors dans tous les recoins. Nos ménagères y trouvent aussi tout ce qu’il faut.
Encore deux pressoirs de plus dans le quartier, chez Bonjour, et chez
Jules Gras. Après les vendanges, ça sent le marc et la piquette. Les deux
cultivent les vignes à Obrist. Jules Gras est un tireur d’élite, couvert de
décorations. Il revient des Abbayes et des fêtes de tir avec son mousqueton, le
torse bombé, vaillant disciple de Guillaume Tell. Il met longtemps à se
dégonfler. Pour faire un peu d’argent de poche, on s’inscrit au stand de tir à
Gilamont, comme « secrétaire », pour noter les scores ou comme
« marqueur » sous les cibles, pour indiquer avec une palette où la
cartouche avait pénétré, ou l’agiter vigoureusement pour une « pendule ».
En partant plus haut, plusieurs maisons attachées les unes aux autres font l’angle avec la Rue du Collège. C’est un nid de vieilles filles. S’il y a beaucoup de pressoirs dans le village, il y a autant de vieilles filles. L’un est-il la raison de l’autre ? Un problème bien vaudois. Tout droit on entre dans le sentier de la Condémine, et en passant devant chez Rimet, on peut continuer sur Nant, Bon Vallon, ou Riant Mont ; mais j’ai fini mon tour du village… ■